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monde ?… Si je pouvais lui donner un conseil, ce serait celui d’abandonner une mode surannée. Le public est bien assez dupé comme cela !

— Mais, connaissez-vous Eugène ?…

— Oui et non.


— Alors, pourquoi en dire du mal ?… Est-ce parce qu’il est dans la nature humaine de s’inquiéter de tout sans relâche ? Est-ce parce que les fautes d’une âme ardente offensent ou font rire la nullité égoïste ? Est-ce parce que l’esprit qui aime ses aises froisse tout ce qui l’entoure ? Parce que nous sommes trop souvent heureux de donner à des paroles l’importance des faits ? Est-ce parce que la bêtise est étourdie et méchante, que les sottises sont importantes pour les gens importants, que la médiocrité seule étant à la hauteur de nos épaules, ne nous paraît pas ridicule ?…


Heureux celui qui fut jeune dans sa jeunesse ; heureux celui qui a mûri à temps, qui s’est fait peu à peu au froid de l’existence, qui ne s’est pas livré à des rêves étranges, et n’a jamais irrité le vulgaire ! Heureux qui fut petit maître à vingt ans, à trente s’est marié avantageusement, s’est dé-