Le monde l’accueillit avec un sourire. Ce premier succès lui donna des ailes : le vieux Derjavine me remarqua et me bénit en descendant au tombeau.
Et moi, n’acceptant d’autre loi que mes passions,
je rendis la foule l’écho de mes sentiments
et de mes émotions ; je portai ma muse indomptée
au milieu des festins et des querelles bruyantes :
elle y devint la terreur des patrouilles de nuit.
C’était au milieu des fêtes qu’elle faisait entendre
sa voix. Elle se livrait au plaisir comme une
bacchante, chantait aux convives des hymnes du
dieu du vin, et, sur ses traces, la jeunesse courait
avec fureur ; et moi, entouré de joyeux compagnons,
je m’enorgueillissais de ma folâtre amie.
Bientôt je partis au loin ; elle me suivit. Que de fois elle adoucit mon triste chemin par ses caresses et par la magie secrète de ses rêves ! Que de fois, sur les rochers du Caucase, je la sentis derrière moi, prendre place sur mon cheval !… comme Lénore nous galopions ensemble, à la clarté de la lune. Bien souvent, sur les rivages de Tauride, à