dait une grande épopée nationale… Hélas ! à la place des lauriers qu’elle préparait à son poète, elle dut bientôt lui creuser une tombe !
En 1835, Pouchkine perdit sa mère. Il reconduisit sa dépouille mortelle au monastère de Sviatogorsky, et, comme s’il eût pressenti sa fin prochaine, il acheta un emplacement tout près de la tombe de celle qui lui avait donné le jour. Vers le même temps, le baron de Hœckerene, ambassadeur de Hollande, et le baron Dantess, son fils adoptif, Français, au service militaire de la Russie, étaient reçus souvent chez Pouchkine. La liaison se continua aux eaux. Tout-à-coup le bruit se répand que Dantess fait la cour à Nathalie Nikolaiévna, et le poète reçoit le même jour dix-huit lettres anonymes, écrites en français, injurieuses pour son honneur et pour celui de sa femme. Celle-ci pria son mari de ne plus recevoir M. Dantess, espérant ainsi mettre fin à ces bruits scandaleux. Les billets offensants continuèrent toujours ; alors le sang arabe[1] que le poète tenait de sa mère s’enflamma ; il provoqua en duel M. Dantess. En acceptant le défi, Dantess demanda un délai de quinze jours, pendant lesquels Joukofski, le prince Viazemski et le baron de Hœckerene firent tous leurs efforts pour apaiser l’affaire. Enfin l’ambassadeur de Hollande déclara à Joukofski que l’explication toute
- ↑ La mère de Pouchkine était fille du nègre Annibal, favori de Pierre-le-Grand, et qui mourut, presque centenaire, sous Catherine II.