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découvrira mon œuvre anonyme et, s’éclairant comme moi de sa lampe, prendra ce parchemin. Il en secouera la poussière séculaire, afin que tous les descendants des Russes orthodoxes puissent connaître le beau passé de leur glorieuse patrie ; qu’ils se souviennent de leurs tsars illustres en apprenant leur gloire et leurs bienfaits nombreux ; et qu’ils invoquent la miséricorde divine en lisant l’histoire de quelque sombre crime. Sur mes vieux jours, je recommence à vivre ; tout le passé défile devant moi ; il n’y a pas longtemps, il bouillonnait encore, chargé d’événements houleux comme la mer, et à présent il dort, il est muet et calme. Bien peu de personnages reviennent à ma mémoire ; déjà j’ai oublié beaucoup de leurs discours, le reste a sombré, à tout jamais perdu.

Mais l’aube est proche, ma lampe s’éteint. Encore un seul, un dernier récit.

(Il écrit.)
GRÉGORI, (se réveillant)

Ce rêve, toujours ce rêve, pour la troisième fois ce rêve maudit ! Et le vieillard, toujours, écrit à la clarté de sa petite lampe. Durant la longue nuit, il n’a pas fermé les yeux.