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VOROTINSKY

Ce n’est pas bien, prince.

CHOUÏSKY

Et que devais-je faire ? Tout dire à Féodor ? Mais tu sais bien que le tsar ne voyait que par les yeux de Godounov et n’écoutait jamais que lui ; et même si j’avais réussi à convaincre le tsar, Boris m’aurait, devant lui, sans crainte démenti. C’était pour moi d’abord l’exil certain, puis la mort. On m’eût étranglé au fond de mon cachot, comme on fit pour mon oncle. Certes aucun supplice ne peut m’épouvanter ; sans me vanter, je ne suis point un lâche, mais ce serait être un sot que d’aller moi-même droit au gibet.

VOROTINSKY

Quel crime affreux ! Écoute mon idée : le meurtrier doit être rongé de remords ; et certainement le sang de l’innocent l’empêchera de consentir à monter sur le trône.

CHOUÏSKY

Rien ne l’arrêtera : Boris n’est pas timide ! Et quel honneur pour nous, pour toute la Russie : l’esclave d’hier, le Tartare, le gendre d’un bourreau, lui-même bourreau dans