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Et avec la route arrivent, sur cette bande de terre entre les lacs de Montigny et Blouin, les premiers « squatters ».

Un, deux, trois, quatre « shacks » de troncs équarris, pas même écorcés, lutés aux interstices, d’argile et de mousse. On aurait dit un camp de nomades. Des tentes dressaient aussi, ici et là, leurs formes irrégulières, carrées ou coniques, trouées par le tuyau d’un fourneau improvisé avec un vieux fût d’essence ou une caisse de fer blanc. On les voyait disséminées au milieu de petites clairières taillées dans la brousse, couvertes de boîtes de conserves vides, de cendres grises et d’ordures.

Le début d’une nouvelle conquête de l’homme sur la nature !… On sent encore autour de la future ville l’indéfinissable parfum des espaces, des steppes et des collines inviolées, des bois impénétrables, des terres en friche, de la neige, des bourrasques : le halètement de la vie sauvage !…

Ensuite, ce ne fut pas long. Durant quelques saisons le petit village fut en proie à une curieuse animation. Des camions, des chariots grossiers venus dont on ne sait où stationnaient ou circulaient un peu partout dans les rues à peine tracées, ou plutôt dans des cloaques où stagnaient toutes les eaux du ciel et du sous-sol. On chargeait et on déchargeait des tonnes de marchandises, des meubles et des pièces mécani-