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mieux connaître et à s’estimer ; et plus d’un couple souvent s’est fiancé sous l’œil indulgent des parents. Aujourd’hui, les jeunes gens préfèrent à ces humbles soirées et aux naïfs récits, le cabaret du village où, dans la fumée des cigarettes et le relent des liqueurs, on absorbe des boissons excitantes ou compliquées et l’on se livre à des conversations pour le moins louches…

Et pendant qu’en cette nuit de Noël on se réjouissait dans toutes les demeures de Bagotville, la tristesse s’était réfugiée sous le toit de Jacques Pelletier.

On avait pourtant réveillonné ensemble, encore une fois, les deux familles Pelletier et Morin ; et l’on s’était même efforcé autant que possible de dissiper les noirs nuages amoncelés dans tous les cerveaux ; mais la pensée seule qu’au prochain Noël, il en manquerait un à la réunion accoutumée, gâtait même cette joie factice… Bientôt, bientôt, hélas ! un adieu, un adieu bien douloureux, allait éclater au milieu des sanglots dans ces familles jusqu’aujourd’hui si heureuses…

Et le pauvre Paul, cause de toute cette perturbation, plus accoutumé pourtant à broyer du rose, en ces jours si gais des Fêtes, qu’à collectionner des papillons noirs, était, ce soir-là, d’une tristesse navrante : – à croire que tous les brouillards et que toutes les brumes amas-