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Puyjalon

« M. Puyjalon était l’homme très indulgent pour les travers et les défauts d’autrui, à condition toutefois que ces défauts ne puissent en rien affecter les lois de l’honneur. Sur ce point, il était d’une rigidité inflexible et il n’admettait pas qu’un homme put survivre à la perte de l’honneur. Ces principes, cependant, n’étaient connus que de ceux qui le fréquentaient assidument, car il n’en faisait pas étalage et se bornait à les mettre en pratique. Nul plus que lui ne répugnait à donner des conseils ; mais si le concours de son expérience et de son savoir était vivement sollicité, et si le solliciteur avait droit à sa sympathie, il rendait le service réclamé avec une franchise qui fit souvent regretter à plus d’un d’avoir recours à son jugement ».

Grâce à toutes ces belles qualités du cœur et de l’esprit, Henry de Puyjalon, on le conçoit, faisait grande figure dans les salons canadiens. Alors, il se faisait tout à tous, et à toutes, toujours avec cette brusque franchise qui était un charme de plus chez lui. Il savait avec son éternel sourire se soumettre à toutes les exigences de la société.

« Il avait », dit encore l’ami que nous avons cité tantôt, « la science d’écouter les sots sans les entendre et sans tenter de corriger leur sottise. Il s’est ainsi épargné beaucoup d’inimitiés. Seulement, il ne tombait pas deux fois dans le même piège. Son esprit était d’une extraordinaire vivacité. Il ne dédaignait pas les bons mots mais il les lui fallait d’un choix délicat. Avec ses amis plus qu’avec tous autres, il était d’une courtoisie et d’une politesse raffinées. Il ne concevait pas que l’amitié put servir d’excuse à cette grossière familiarité qui autorise deux amis à se renvoyer des brocards qui seraient injurieux à l’adresse d’un indifférent ».