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Puyjalon

euphorie, bercé par le doux murmure de l’eau de la baie, tout devint bientôt à ses yeux vacillant, confus, indécis : ses pensées ondoyèrent. En face de lui, sur la rive opposée de la baie, une famille de Montagnais était campée. Bientôt, dans l’obscurité grandissante, il ne pouvait apercevoir que le feu du campement qui paraissait prodigieusement éloigné… Tout à coup, il lui sembla que ce foyer de sauvages se transformait en une puissante étincelle électrique qui vint éblouir ses regards. Et telle était l’intensité de cette lumière qu’elle pénétrait la muraille rocheuse où s’appuyait sa tente. Alors s’accomplirent des transformations singulières. Les granits, les gneiss et les micaschistes se décomposaient en leurs éléments… Les feldspaths ondulaient en laves, les quartz coulaient en fleuves jaunes que les micas recouvraient comme une tente cristalline… Puis la lumière pénétra dans les entrailles de ce coin de terre d’où il aperçut, s’entrecroisant en tous sens, des filons de toutes les couleurs où le jaune dominait. Dans la texture du sable de la grève que pénétrait la fulgurante lumière, il distinguait des kaolins très purs, et dans de larges veines rouges tachées de violets surgissant du kaolin, il reconnut du cinabre : puis de la galène et de l’oxyde d’étain coulaient en filons noirs constellés de parcelles lumineuses ; et, plus loin, encastrés dans la pierre, des cristaux de molybdénite, de bismuthine, de cobalt arsenical, et des filaments d’argent natif au travers de pépites d’or pur ; enfin, des minerais de cuivre et de nickel qui se mêlaient à du fer hydraté et à des fers spathiques et oxydulés.