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nir planter sa tente et d’élire son domicile dans une des régions les plus isolées et les moins accessibles de la province de Québec ? On a déjà expliqué que c’est à la suite de revers de fortune qu’il prit le parti de recommencer sa vie dans un pays nouveau. Mais il semble bien que jamais il ne lui vint à l’esprit que ce nouveau pays puisse être un autre pays que le Canada. Esprit curieux et avide de savoir, d’une solide formation intellectuelle, il avait lu bien jeune les récits des missionnaires et des explorateurs, et il connaissait aussi bien qu’un Canadien l’histoire de notre pays. Ayant des inclinations pour l’étude des sciences de la nature, il dut se sentir attiré par nos vastes horizons aussi bien d’ailleurs que par la faune du Saint-Laurent et des Laurentides.

Jamais un Français ne fut plus à l’aise que lui dans notre Province et jamais il ne devint si tôt profondément Canadien. Mais s’il aima ardemment son pays d’adoption, il eut des préférences très marquées pour cette partie du golfe que l’on appelait alors et que nous aurions plus que jamais intérêt à appeler le Labrador canadien.

C’est là sans doute qu’il dut passer les heures les plus heureuses de sa vie, soit à pêcher ou à chasser, soit à observer la faune aquatique ou terrestre, soit à explorer, à étudier, à réfléchir et à écrire. Il avait l’étoffe d’un parfait coureur de bois et aucune difficulté ne le rebutait. Il ne semble avoir éprouvé que du plaisir, lui qui était né dans un château, à vivre très modestement et très peu confortablement dans un camp à peine plus luxueux que celui d’un trappeur.