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Puyjalon

blique. Madame de Puyjalon mourut subitement à Québec en 1900, pendant que son mari était sur la Côte. Cette mort l’avait profondément et douloureusement affecté. Aux yeux du vulgaire, il avait dû accepter cette épreuve comme un événement naturel, inévitable, mais aux regards de ses amis intimes, il semblait évident que ce coup le torturait. Son esprit s’assombrit aussitôt ; et c’est alors qu’il prit la résolution de se fixer définitivement et totalement dans la région qu’il aimait, loin du bruit, loin des hommes, loin des décevantes faveurs de la civilisation.

Et il se fixa solidement, peut-on dire, sur l’Île-à-la-Chasse.

Raymond-Roger de Puyjalon, né, comme nous venons de le voir, sur l’Île-aux-Perroquets, y fut baptisé par l’abbé Condé Nadeau, missionnaire à Mingan. L’abbé Nadeau ce fut, sans aucun doute « mon curé », le héros d’un autre délicieux récit d’Henry de Puyjalon. C’était un jeune prêtre, à peine âgé de trente-trois ans qui, le soir d’une épouvantable tempête d’hiver, était tombé, tel un bloc de glace, dans la tente où, dans une douce euphorie, Puyjalon savourait l’« étrange bonheur de se sentir seul, dans le bois, loin des imbéciles et surtout des gens d’esprit. » Quel touchant récit !

Pourquoi le missionnaire avait-il fait à pied près de trente lieues par une aussi affreuse tempête, exposé, à toute minute, à la mort ? Puyjalon le demande au prêtre qui évite d’abord de répondre, lui confiant à la fin qu’il doit se rendre à Mingan où se meurt une pauvre femme. Puyjalon est dupe. Le prêtre repart le len-