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Peter McLeod

Dufour. Il ira lui-même mettre une fois pour toute ces salauds à la raison. Se rendre en canot à Saint-Fulgence, c’est une affaire d’une heure au plus…

Et Peter McLeod partit aussitôt accompagné de Michel Simard. Il tenait à faire comprendre à la Compagnie que l’ère des tracasseries entre ses hommes, les colons dont il avait souvent voulu se faire le protecteur, et les trappeurs à gage de la C.B.H. était du passé comme, d’ailleurs, le lui avait laissé entendre, l’hiver dernier, Tommy Smith. Voilà pourquoi il s’offrait si bénévolement à aller défendre son ancien « boulé ». Il le lui fit comprendre, d’ailleurs, sans la moindre arrière-pensée.

« Tu sais, Michel », lui dit-il, pendant que tous deux canotaient à tour d’avirons, « c’est pas pour tes beaux yeux que j’veux aller dire deux mots à ces messieurs… En me lâchant, l’année dernière, Michel, tu m’as joué un sale tour de cochon… et tu aurais mérité que je te botte le ventre… »

Ils arrivèrent à la pointe de Saint-Fulgence un peu avant le coucher du soleil. En haut de la pointe, on apercevait la maisonnette de Michel Simard, abritée de grands arbres qui se lançaient vers le ciel, troncs énormes qui soulevaient un plafond de pénombre. À l’extrémité de la pointe, tout près de l’eau qui se décolorait à chaque minute, des pins presque solitaires tremblaient du pied jusqu’à la cime. Là-bas, la rivière, par une échancrure dans les caps, laissait apercevoir comme un coin d’épaule nue. Une aquarelle parfaite !… Des ronds d’un soleil rouge tiquetaient l’ombre verte, et s’exhalait de la terre un parfum de sapinage trop sec. La