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Peter McLeod

faire broncher et en gardant lui-même l’équilibre. Les sauvages rirent à gros éclats, exprimant des doutes à leur façon. L’exploit semblait tout nouveau pour eux. Un des chefs, courageusement, voulut devancer Peter McLeod. Il sauta et tomba dans l’eau au milieu de l’hilarité générale.

Alors, Peter McLeod, ayant enlevé son chandail, son large “saw west” et ses hautes bottes malouines, et le canot ayant été solidement immobilisé contre le courant à l’aide d’un câble, il sauta, les pieds joints, en plein milieu du canot. Celui-ci ne broncha pas d’une ligne et l’homme resta debout, droit, les bras croisés sur la poitrine, tel un dieu marin. La mer était basse et Peter McLeod avait sauté d’une hauteur de quinze pieds…

Plus tard, beaucoup plus tard, on parlait encore avec admiration de cet exploit, comme les astronomes parlent des étoiles, c’est-à-dire comme d’une clarté lointaine et mystérieuse, brillant au zénith du firmament saguenayen…

Et le soir de cette journée mémorable ?… Derechef, la maison du moulin fut vidée de ses meubles jetés dehors, pêle-mêles, les pattes en l’air, et la place apparut nette, claire pour la danse. Vite, les assistants se séparèrent en deux camps : les hommes, les femmes, puis, dès les premières notes d’un violon criard, le plancher résonna sous les grosses bottes et les souliers ferrés qui trépidaient en mesure. Les hommes qui n’avaient pas de femmes dansaient avec d’autres qui avec la grâce lourde des ours, nouaient des foulards autour de leur bras gauche. On dansa de vieilles bourrées amé-