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Peter McLeod

levant, alerte, de la misérable dépouille d’ours où elle était à demie couchée. Je me sauve, Tommy Smith doit être sur le point d’arriver, bonsoir ! »…

Et, dehors, elle hume un grand coup de l’air froid et revigorant qui souffle du lac. Au dessus de sa tête, les paysages du ciel, d’une clarté mouillée, reposent, tout unis, au loin, sur la couche des monts saguenayens. Seul, sous le couchant, un nid de nuages s’est accumulé, arrondi et bouffant. C’est de là que surgira tantôt et tout à fait, la nuit.

La cabane de Tommy Smith était tapie tout au pied du Rocher, presque à l’extrémité de l’éperon que forme le cap en s’enfonçant légèrement dans le lac. C’était un simple bungalow de bois rond, propret, assez avenant, mais d’une simplicité toute édénique. Il avait, depuis plusieurs années, servi de maison aux commis du Poste de Métabetchouan. C’était autour de ce « Château des solitudes » que venait de préférence, chaque automne, camper ce qui restait de sauvages de la région, quand les hommes s’en allaient pour l’hiver, chasser dans les infinies forêts du nord. C’était comme une villa de campagne où les gens du Poste aimaient à aller oublier, le soir et la nuit, les tracas journaliers du magasin, ces acharnées transactions de fourrures troquées dans l’atmosphère irrespirable de pièces surchauffées et puantes de l’odeur fauve des peaux de bêtes.

Tommy Smith habitait là avec sa femme, personne très sèche à longue figure de bouc vieilli, et sa fille, un peu plus jeune que Mary Gauthier et, par hasard, peut-on dire, du même tempérament aventurier, au-