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Peter McLeod

Dans la cabane, la plus grande et la plus confortable, et qui était celle du chef provisoire du campement, à part Mary Gauthier et l’ancêtre, il y a quelques vieilles aux mèches grises effilochées, aux paupières rouges. L’une d’elles est accroupie près d’un feu et souffle pour en activer la flamme. De sa lèvre inférieure pendante coule un filet de bave. Le feu rougeoyant éclaire faiblement un visage séché, une bouche aux lèvres avalées par des mâchoires démunies et, sous des cheveux gris sale, des yeux transparents, pleins d’eau, des yeux d’enfant candide ou d’hallucinée…

Le bois mouillé fait une fumée âcre et crache en gargouillant. La vieille veille au repas du soir : un plat de pus jaunâtre obtenu par la macération de poisson pourri… Dans un coin sombre, il y a un autre vieillard dont les doigts trembleurs arrachent les écailles d’une longue tête de brochet plus desséché qu’une pièce de bois. Le bonhomme est trapu, ramassé comme une souche. Par terre, deux enfants se disputent un vieil os de gigot de bœuf que les chiens n’ont pu faire disparaître. Ce sont de petits squelettes aux jambes décharnées et au ventre ballonné, deux fois trop gros…

Mary Gauthier trône au milieu de ces déchéances humaines sans le moindre haut-le-cœur. Elle rit, elle interroge les ancêtres à haute voix, claironnante. Elle semble follement s’amuser.

Mais l’ombre se fait de plus en plus épaisse dans la sordide cabane. La nuit tombe vite…

« Allons, bonsoir !… fait Mary Gauthier, en se