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le tour du saguenay

Voici cette légende telle qu’elle a été racontée dans L’appel de la Terre[1].

« C’était un beau soir d’été, voilà des siècles. Le Saguenay est plein des feux mourants du soleil qui se couche derrière les Laurentides. Alors, le Saguenay, plus qu’aujourd’hui encore, vibrait avec amour à tous les bruits de la Nature et, ce soir, tout chante sur la terre comme tout sourit dans les cieux… Donc, c’est un soir d’été, voilà des siècles… Deux nacelles s’avancent, silencieuses, sur les flots qui s’en vont là-bas d’où nous venons… Ce sont deux canots d’écorce tels que les Indiens les façonnent encore aujourd’hui ; chacun d’eux est monté par deux hommes qui battent les flots en cadence. Tous quatre sont enfants des bois et ils s’abandonnent, ce soir, aux charmes de leur éternel rêve…

« Tout à coup, nos Indiens arrivent aux pieds de deux caps qui font la nuit de leurs ombres immenses ; entre les deux caps, il y a une anse arrondie et coquette.

« Les canots glissent, plus rapides ; coupant la ligne d’ombre que projettent les caps, ils viennent s’échouer dans la baie. Les canots sont vite couchés sur la grève où ils semblent déjà dormir et, bientôt, s’élèvent vers le ciel les flammes d’un grand feu de sapin. Les quatre Indiens, disposés à l’entour du foyer, regardent longtemps, rêveurs, les “rougeoiements” de la flamme et les spasmes des tisons qui se tordent dans les cendres ardentes… Approchons-nous de ces hommes austères, premiers habitants de ces farouches solitudes et prêtons

  1. L’Appel de la Terre, roman canadien par Damase Potvin, l’auteur du présent ouvrage. L’Appel de la Terre, dont la scène se passe au Saguenay, est épuisé aujourd’hui.