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LE « MEMBRE »

centres et le défaut de communications, il m’a tranquillement répondu que tout cela, c’était des « graines de fortune ».

Quatre hivers après, cet ingénieux cuisinier possédait à Winnipeg une maison d’exportation qui centralise aujourd’hui tous les produits de l’Ouest.

— Mais il faut avouer, objecta Ewart Hall, qu’il y avait là non pas seulement une affaire de simple organisation, comme vous dites, mais aussi une « luck ».

— Et qu’en savez-vous ? répondit tranquillement le financier.

— Le fait est qu’il n’y a rien d’impossible aux hommes… de bonne volonté, déclara Stevenson ; tout est possible, ou plutôt, comme disait Talleyrand, tout arrive… Tenez, j’ai connu à Saint-Jean de Terre-Neuve, commença-t-il, un certain professeur du nom de Muller qui avait réussi à capturer cinquante baleines femelles qu’il avait parfaitement apprivoisées c’est-à-dire, domestiquées ; ces délicats animaux se laissaient traire avec autant de bonne grâce que les hôtesses indolentes de nos grands pâturages du « Far West ». Le lait de ces baleines, recueilli à l’aide d’un appareil spécial, possédait des vertus curatives auprès desquelles pâlissait l’huile de foie de morue. Ce Muller a fait une fortune.

— « Si non e vero, e bene trovato »… riposta Hall avec un sourire ironique. Réussir à capturer cinquante baleines du même sexe et s’en servir pour… l’industrie laitière, voilà assurément des éléments pour un canard qui ferait les délices du « Boston American »… Sûrement ! il ne s’agissait pas, en l’occurrence, de la