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LE FRANÇAIS

phiques que la musculature solide de jarrets hardis, durs au labourage. Aussi, les travaux de la terre semblaient-ils, pour le moins, assez indifférents à Jacques qui n’aimait pas, du reste, à en parler dans les conversations des veillées ; n’empêche cependant que l’occasion présentée, il se prétendait avec ostentation expert à tous les travaux des champs. À l’entendre, il excellait en tout : au labourage et au hersage, au fauchage ou au coupage des grains. Il coupait à la faucille aussi bien qu’il jouait de l’harmonium et il dirigeait l’attelage du labour aussi aisément qu’il « callait » un quadrille double.

Ce fut un événement dans la paroisse quand on apprit que Jacques Duval faisait sérieusement la cour à Marguerite Morel : « Quel mariage bien assorti cela va faire ! » disait-on généralement. Mais, pour quelques-uns. parmi les plus intimes, Marguerite paraissait bien sérieuse à côté de Jacques. La jeune fille était toute au devoir de la ferme, aimait la terre autant et même plus que son père, tandis que Jacques Duval ne pensait qu’à s’amuser et à voyager ; c’était vrai. Mais on concluait tout de même qu’ils allaient bien ensemble. De là à s’attendre, chaque dimanche, à la publication des bancs à l’église, il n’y avait pas plus loin que de la Saint-Sylvestre au Jour de l’An. Et l’on rêvait d’une noce qui mettrait en révolution toute la jeunesse de la paroisse.

Cette perspective, bien entendu, enchantait Jean-Baptiste Morel toujours hanté par ses ambitieux projets. Un moment, il vit tout en rose : sa fille mariée