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LE FRANÇAIS

« Je dis de ça, M. Morel, que vous vous trompez et, encore une fois, que vous vous faites des illusions. J’arrive justement, à midi, de Fabre et j’ai vu là, en chair et en os, comme je vous vois, Jacques Duval. Je lui ai parlé et il m’a parlé. Il est vrai qu’il était joliment « maganné » le pauvre Jacques Duval, mais ça ne l’a pas empêché de montrer beaucoup d’énergie quand il m’a annoncé sa résolution définitive, presque farouche, de s’en aller, de quitter, comme il disait cette vie de bête qu’il menait, qui était un esclavage constant et qui avait failli prendre ses os.

Jean-Baptiste Morel, même devant l’assurance de son interlocuteur, ne fut pas encore convaincu et, braquant comme deux revolvers ses yeux agrandis vers M. Larivé :

« Ah ! mais, vous savez, en v’la encore une bonne !… Vous voulez vous moquer toujours de moi, M. Larivé… J’vous invite à mesurer vos paroles. »

— Je ne veux pas du tout me moquer de vous, M. Morel ; c’est comme je vous le dis. Jacques Duval est à l’heure qu’il est à Fabre et il arrivera à Ville-Marie dès qu’il sera un peu remis de… Mais, au fait, vous ne savez pas, vous… Ah ! c’est toute une histoire. Écoutez, M. Morel, Jacques Duval a manqué son coup de venir passer les Fêtes à Ville-Marie à cause du mauvais temps ; mais il s’était réservé la permission de son « boss » pour les Jours Gras. Malheureusement, la veille des Jours Gras, là-bas, comme ici, le temps ne se comportait pas mieux qu’aux Fêtes. Mais Jacques Duval avait dans la tête, plantée comme un clou, l’idée