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LE FRANÇAIS

brasier, ta ! ta ! ta ! on fait tout ça, icitte, vous savez, quand y a d’là messe de « minnuit » ; on rit, on chante, on danse… Vous allez voir ça, vous’aut’s les jeunesses. Vous m’parlez des restaurants des villes, pour l’réveillon. J’sais pas c’qu’on mange là, mais j’sais c’que j’vas vous faire manger icitte. Vous allez voir. Bonté divine ! tout c’t’animal-là va y passer et ben d’aut’choses encore, allez ! Et vous allez voir, avant, la messe de « minnuit », dans l’campe, vous allez voir comme c’est beau. Ça fait rien qu’trois fois dans ma vie que j’vas m’trouver à voir ça. La dernière fois, c’était, y a ben quinze ans d’ça, su la Gatineau. C’était beau, j’vous assure ! Ça sentait l’sapin partout, rapport qu’on avait tapissé tous les pans du campe avec des branches de sapin, de pin et d’épinette rouge. On se serait cru en plein en-dessous du bois, au printemps… Y avait des hommes, des beaux chanteux, j’vous assure, qui s’étaient exercés à chanter des cantiques « en accord » avec trois accordéons et deux violons qui s’accordaient ensemble comme une vraie bénédiction. J’vous assure qu’c’était malaisé d’faire plus beau ! J’m’en rappelle comme si c’était hier au soir. Vous savez, on va tâcher d’faire comme ça, à soir. Quant à moi, j’vous en promets un, d’réveillon ; c’est l’père Phydime qui vous l’dit…

La besogne du débitage était finie. Prestement, le « cook » avait étendu avec précautions la peau du caribou qu’il cloua sur un coin de la cloison de la cuisine, pour la faire sécher. Après quoi, il avait ouvert la porte basse d’une soupente d’où s’échappa une