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LE FRANÇAIS

gleterre en péril. L’on enrôlait des soldats canadiens. Chaque jour, l’on pressait l’appel pour de nouveaux volontaires. L’on parlait même de conscription. L’Europe méditerranéenne était en grand danger, menacée d’être envahie par la barbarie des bois. Du Canada, des troupes partaient, nombreuses, pleines d’enthousiasme, volant au secours des deux mères-patries qui demandaient de l’aide à la jeune Amérique. Un jour, à la fin de l’hiver, Jean-Baptiste Morel apprit avec angoisse que son fils avait pris un engagement dans un régiment en entraînement à Québec et qui devait partir durant l’été. Ce fut un rude coup pour le père et surtout pour la mère qui ne put supporter d’ailleurs bien longtemps cette épreuve et qui, quelques semaines plus tard, quittait son homme et Marguerite pour le grand voyage de l’éternité.

Joseph Morel avait écrit à ses parents que la guerre ne serait pas longue, qu’elle se terminerait avant la fin de l’année et qu’il ne partait, en somme, que pour quelques mois ; il avait pensé que son devoir était de s’engager, lui, jeune, vigoureux, et que la terre, enfin, ne mourrait pas de son sacrifice momentané ; il avait assuré son père qu’il viendrait pour les labours d’automne et avait exprimé que jamais plus ensuite il ne quitterait la maison, que son éloignement temporaire lui rendrait, avait-il dit, encore plus chère.

Deux ans, Joseph Morel resta au front où il se battit en brave dans les rangs du 22e Bataillon Canadien-Français qui s’immortalisait. Il vit Festubert, Courcelette, Vimy où il fut blessé. Il écrivait sou-