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LE FRANÇAIS

Lambert ne parle-t-il pas la même langue que nous, ne pratique-t-il pas la même religion ? N’est-il pas, au bout du compte, ce qu’étaient nos arrière grands-pères ? Et on l’appellerait un étranger ? Et puis, en bonne vérité, ne lit-on pas dans les gazettes qu’il faut encourager l’immigration française au pays de Québec ? N’est-ce pas pour conserver à notre peuple, sans autre lutte, sa survivance française, sa foi, sa langue et ses traditions, tout en fournissant au pays des bras de plus pour finir de le défricher ?… Marguerite Morel a appris tout cela au couvent et elle assure que c’est bien vrai, que cela ne peut être autrement. Une sœur française lui a même dit, un jour, que les Canadiens-français portés à s’anglifier, grâce à leur entourage toujours de plus en plus entreprenant et riche en moyens d’assimilation, ne resteront français que grâce au contact de nouveaux arrivants du pays des ancêtres. Ingénuement, avec des mots simples et des idées dont elle se souvenait avoir entendu d’expression, Marguerite, devant son père étonné, embarrassé, détailla son plaidoyer, en souligna, à l’esprit simpliste de Morel, quelques traits parmi les plus frappants.

« Nous sommes », disait-elle, encore, « perdue en cette Amérique, une race issue de la France. Nous vivons de la France ; nous nous sommes battus et nous nous battons encore pour conserver la langue, la religion, les traditions et les coutumes de la France ; nous devons accueillir, aujourd’hui, ceux qui nous viennent de France comme des frères dont nous avons été long-