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LA RIVIÈRE-À-MARS

qu’ils reviennent au temps où ils faisaient passer à leurs parents d’entières nuits blanches après des journées de dur travail.

Souvent, le soir, quand ils étaient seuls, Alexis Maltais et sa femme causaient, assis, l’été, sur le perron, ayant en face d’eux la baie qui brillait sous la lune et les étoiles, l’hiver, dans la cuisine, près du poêle à trois ponts dont le foyer pétillait sous de lourdes bûches de sapin, dans le halo de la lampe à pétrole.

Et tous deux parlaient de l’avenir de leurs enfants. Pierre aidait bien un peu son père aux travaux de la terre et aux chantiers de la coupe du bois à la Rivière-à-Mars et au Lac Ha ! Ha ! mais, à la vérité, il y mettait peu de cœur. Alexis Maltais s’était depuis longtemps aperçu (et sa femme avant lui) que l’aîné n’avait pas pour la terre l’amour que, lui, il éprouvait à cet âge. Ça viendra, avait-il dit, pour s’encourager. Mais les années passaient et il attendait en vain que son fils se mît à aimer ce qu’il aimait, lui, par-dessus tout. Il était inquiet. Heureusement que le cadet, Arthur, s’appliquait à pallier ces inquiétudes. Celui-là était un vrai fils d’habitant, se plaisait à dire sa mère.