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LA RIVIÈRE-À-MARS

Pénible randonnée. Depuis près de trois mois, la neige a tombé presque sans répit sur ce coin accidenté, bouleversé, des Laurentides. Le vent s’élève à tout instant, par rafales, frappe les pics, s’abat dans les ravins. Et la forêt et le chemin disparaissent sous de perpétuels rideaux mouvants. À chaque coup de vent, tout s’enfuit, tout se cache sous un linceul, sans bruit. Tout s’enveloppe dans un silence étrange, mystérieux, et, soudain, tout siffle et hurle d’épouvante.

Ici, dans une savane, la neige est devenue subitement « boulante », épaisse ; elle colle aux pieds et à la traîne, masse lourde, difficile à manœuvrer. Là, dans une gorge de rochers, des rafales prolongées s’engouffrent qui n’annoncent rien de bon. Mais il faut avancer, et l’on va, sans cesse bousculé par la tempête qui se panache de sublimes horreurs. Tout se redresse effroyablement ou tout s’anéantit dans les tourbillons de la tourmente. Durant de longues heures, arbres, sentiers, gens, sont secoués, enfouis, souvent perdus, sous d’effroyables coups de poudrerie.

Et les croque-morts cheminent, cahotant, haletant, au fond des coulées où l’orientation devient