Page:Potvin - La Rivière-à-Mars, 1934.djvu/41

Cette page a été validée par deux contributeurs.
43
LA RIVIÈRE-À-MARS

Tant qu’on marcha sur la glace de la baie et de la rivière, tout alla relativement bien, encore qu’il fallût, à la force des jarrets, tracer ici et là le chemin dans de formidables bancs de neige et endurer les cent mille coups de verge du vent glacial qui, sur la glace unie, faisait dévier en tous sens le misérable et macabre équipage. Il en fut ainsi jusqu’à l’Anse-Saint-Jean ; et les pittoresques beautés des caps Trinité et Éternité qui émerveillent de nos jours les milliers de touristes descendant ou remontant le Saguenay, confortablement installés dans des palais flottants, durent être bien indifférentes aux quatre primitifs croque-morts de la Baie des Ha ! Ha ! qui cheminaient à l’ombre de ces rocs immenses, haletant sous le poids sacré de leur charge et fouettés par les coups du grésil.

À l’Anse-Saint-Jean, on entrait dans les terres pour suivre un misérable sentier, battu durant l’été mais vierge pendant l’hiver, qu’on appelait le Chemin des Marais et qui menait, à travers les montagnes, sur une distance de plus de soixante milles, jusqu’aux vieilles paroisses de Charlevoix. C’était la partie la plus ardue du voyage.