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LA RIVIÈRE-À-MARS

d’ailleurs pratiqué de temps à autre à la Baie, pendant ses soirées, pour son compte et pour celui de ses voisins qui avaient à faire « radouber » leurs chaussures. Il se remit à travailler le cuir. Il fabriqua des bottes sauvages, des bottes malouines, des souliers de bœuf, des « marchedons » ; il ressemela des bottines, des savates, répara des traits de charrue, des harnais. Parfois, quand le temps était mauvais, dès la fine pointe de l’aube, il s’enfermait dans sa petite boutique — une chambre de la maison — et il travaillait, travaillait jusqu’au soir, même à la lueur de la lampe à pétrole. Il voulait oublier les anciens jours ensoleillés où il besognait au grand air dans les champs blonds. Parfois, levant la tête au niveau de l’unique fenêtre de sa boutique qui donnait du côté de la Rivière-à-Mars, il apercevait un coin des prairies de sa terre, et son cœur se serrait. Non, l’oubli ne pouvait sitôt venir !

Tous les jours, des compagnons de l’ancienne Sainte-Marie venaient lui commander du travail et ils aimaient à profiter de l’occasion pour jaser, à la façon des vieux, des choses du temps passé : arrivée de la goélette un beau soir de juin