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LA RIVIÈRE-À-MARS

un allié dont les coups semblent tout de même vous défendre.

Mais dans le calme, le silence effraie, oppresse ; dans la quiétude de l’air, l’haleine du monde végétal domine l’homme.

Et en ce beau soir de la fin de juin, c’est le calme. Énorme ! C’est le silence. Pesant ! L’heure des « lata silencia » de Virgile. Mais qu’est-ce ? Du côté de la baie, tout au bord de la lisière des pins, au fond d’une petite anse, éclate une sonnerie étrange, inouïe, tantôt à grandes volées, tantôt à petites notes égrenées, rapides, suivies de longues vibrations. Un envol puissant de sons et de battements flottants.

Le soleil a basculé derrière les pics abrupts de la « rivière aux eaux profondes ». Le bleu de l’ombre joue encore sur l’eau de la baie, avec un peu de l’or blanc de la lumière agonisante. Et le silence plane toujours que rompent seulement, ici et là, des concerts assourdis de rouges-gorges et, tout-à-coup, pendant quelques minutes, ces sons de gong, ces sonneries étranges. Puis, sur toute la lisière, un grand frisson saisit les iris d’eau, les gentianes sauvages, les fougères, et les immobi-