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LA RIVIÈRE-À-MARS

Le soleil baissait. Ses rayons, frappant les quelques arbres isolés dans les champs et les piquets de clôture, bariolaient les chaumes de mille rayures sombres.

— Mon bois doit être scié, à c’t’heure, se contenta de répondre Alexis Picoté, d’une voix altérée. On va descendre, hein ?

Vers cinq heures, Alexis Picoté, juché sur son voyage de planches humides et qui sentaient bon l’épinette fraîchement sciée, retournait à la maison au pas tranquille du cheval bien reposé. Tout en avançant, il se sentait comme engourdi par une tristesse sans nom que rendaient plus intense encore les regards pourtant distraits qu’il jetait aux terres, le long de la route. Ce qu’il en apercevait aux dernières clartés du jour lui paraissait aussi frais, calme et sain, qu’il se sentait, en ce moment, le cœur tourmenté. Les toits des maisons qui bordaient la route et qu’estompaient les premières ombres, les contours capricieux ou la ligne droite des clôtures qui cheminaient dans la brunante, les dépendances des fermes qui se dessinaient en vifs reliefs sur les teintes grises des champs, les quelques rares passants qu’il rencon-