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LA RIVIÈRE-À-MARS

guère sa vivacité criarde et son entrain trop artificiel, on fit en sorte que tout pût lui plaire.

Mais ce qui l’intéressa le plus — Alexis et Élisabeth en furent longtemps suffoqués comme d’un sacrilège ! — c’étaient les larges dimensions de la cuisine qui aurait fait, criaillait-elle, une bien belle salle de danse. Pourtant, la maison d’Alexis Picoté était l’une des plus avenantes de la paroisse, avec ses encadrements de portes et de fenêtres peinturés en vert qui faisaient ressortir la blancheur chaulée et souriante des murs. Tous les ans, Alexis Picoté goudronnait le toit de bardeaux de cèdre. En cette saison, le parterre éclatait encore de couleurs vives : le rouge sang des géraniums, le mauve rosé des « quatre-saisons », l’écarlate aux pétales éclatants des « saint-Joseph », le violet sombre des pavots et toute une rangée de touffes sapineuses de « vieux-garçon » piquées partout de cœurs saignants. Les feuilles des bouleaux et des érables argillières étendaient sur le sol leurs mordorures reluisantes. À côté de la maison, les tournesols élevaient à plus de trois pieds au-dessus des clôtures leurs énormes fleurs jaunes, brunes au centre. Enfin, en arrière de la maison, la cour