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LA RIVIÈRE-À-MARS

récit — tragique plus que le théâtre classique — de ces randonnées de quatre ou cinq lieues en des chemins-précipices au temps des maringouins et des brûlots, quand on était obligé d’habiller les chevaux de feuillages pour les préserver des taons, voyages d’où hommes et bêtes arrivaient ensanglantés, boursoufflés, aveuglés, altérés. Mais ces braves gens ne s’en sont jamais plaint.

Pas même le postillon de Sa Majesté qui parcourait tous les samedis la distance qui sépare Chicoutimi de la Baie des Ha ! Ha !, ni Camille Dufour qui durant plusieurs mois n’avait pas hésité à entreprendre, chaque semaine, ce cahotement de vingt heures, aller et retour, pour faire un brin de cour à Jeanne Maltais tous les dimanches. Les amoureux des régions primitives ont parfois, dirait-on, du sang de héros dans les veines. Quand Camille Dufour eut obtenu pour prix de ses misères la fille d’Alexis Picoté, il se promit de recourir le moins souvent possible aux offices du postillon de la Baie, qui d’ailleurs eut bientôt un nouveau client.

Car Pierre Maltais se mit, lui aussi, à prendre la voiture de la poste. La fainéantise a peut-être