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LA RIVIÈRE-À-MARS

dressent vers le ciel des torses nus et noirs. Mais il reste encore dans ces décombres quelque chose de puissant, de grandiose. D’ailleurs, on pénètre bientôt dans un coin de forêt encore inexploitée et qu’aucun fléau n’a visitée. Le chemin s’enfonce comme avec crainte dans les profondeurs du bois. Tout est silencieux, sauvage ; pas de cabanes de bûcherons ni de colons ; tout donne dans sa plénitude l’impression du repos, de la grandeur, de la vie libre, riche, indépendante. Plus loin, le chemin, toujours cahoteux, toujours malaisé, montre la forêt du sommet d’un plateau ou des pentes d’un ravin. Elle s’étale ici comme un tapis, là comme un tableau, s’offre comme l’ornement merveilleux du plus somptueux des palais de rêve. Tout à coup, à l’orée d’un vallon boisé ou dans l’écartement de rochers perpendiculaires, apparaît un gracieux petit lac, diamant qui brille dans un enchâssement d’émeraude et d’or vert. Plus loin, un bout de clôture d’abatis, un morceau de terre semée grand comme la main, annoncent le voisinage d’un colon. On ne la voit pas toujours, la cambuse du colon, cachée la plupart du temps derrière un pan de forêt. Mais ce vestige de vie