Page:Potvin - L'appel de la terre, 1919.djvu/70

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Quelle joie ! s’écria la jeune fille ; contez-nous-la, voulez-vous ?

— J’y prendrais franchement un grand plaisir, dit M. Davis.

— Ça fera passer le temps, ajouta négligemment Gaston Vandry.

Tous quatre prirent place dans le creu d’un rocher, au fond de la petite baie et, le maître d’école, comme s’il fut devant ses élèves, commença la légende du Cap Trinité, telle qu’on la raconte dans le pays du Saguenay.[1]

C’était un beau soir d’été, voilà des siècles. Le Saguenay est plein des feux mourants du soleil qui se couche, derrière les Laurentides. Alors, le Saguenay, plus qu’aujourd’hui encore, vibrait avec amour à tous les bruits de la Nature et, ce soir, tout chante sur la terre comme tout sourit dans les cieux… Donc, c’est un soir d’été, voilà des siècles… Deux nacelles s’avancent, silencieuses, sur les flots qui s’en vont là-bas d’où nous venons… Ce sont deux canots d’écorce tels que les Indiens les façonnent encore aujourd’hui ; chacun d’eux est monté par deux hommes qui battent les flots en cadence. Tous quatre sont enfants des bois et ils s’abandonnent, ce soir, aux charmes de leur éternel rève…

Tout à coup, nos indiens arrivent aux pieds de

  1. — Cette légende a été racontée en de beaux vers, dans l’« Oiseau Mouche » du Séminaire de Chicoutimi, en 1894, par M. l’abbé Alfred Tremblay, (Derfla) de Chicoutimi.