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L’APPEL DE LA TERRE

et éternels voyageurs missionnaires : Dablon, DeQuen, Albanel et tant d’autres dont la petite baie aux eaux bleues pourrait nous raconter l’héroïque odyssée ; ici, se sont succédés, même confondus, les marchands avides de gains, les traiteurs aventureux, les chasseurs infatigables, les sauvages de contrées inconnues, depuis les Micmacs du Golfe, les Montagnais et les Papinachois du Nord, jusqu’aux Abénaquis du Sud ; ici, fut le premier poste du Canada, le plus fréquenté, le plus riche ; le débouché naturel d’un vaste pays de chasse et de pêche ; le premier port où pouvaient ancrer tous les vaisseaux du monde ; ici, enfin, a rayonné pendant plus de deux siècles, la grande œuvre civilisatrice de nos aïeux… Tadoussac, Hochelaga, Stadacona ! trois grands noms dans notre histoire. Les deux derniers bourgs sont devenus les deux plus belles villes du Dominion ; seul Tadoussac est resté à peu près ce qu’il était : un pauvre village avec tout autour des précipices et des montagnes !…

« Un pauvre village !… » murmura soudain Paul Duval sortant d’une rêverie qui l’avait, pendant quelques instants, porté trois siècles en arrière. « Hochelaga, Stadacona ! » continua-t-il, les yeux devenus brillants, « deux belles et grandes villes : Québec et Montréal !… Il doit faire bon vivre là plutôt qu’ici, parmi les morts, les flots tourmentés et les rochers !… »

Mais le souffle très doux de la brise du large vint jouer dans les cheveux de l’instituteur, un parfum âcre de la résine des sapins du plateau lui monta à la gorge et le cri joyeux d’un enfant, du côté du village,