Page:Potvin - L'appel de la terre, 1919.djvu/160

Cette page a été validée par deux contributeurs.

vateurs laissent errer librement, à l’aventure, le long des routes.

Autour des fermes, des vaches courent des taches d’herbe maigre, au milieu de flaques d’eau, et meuglent par moments, vers les maisons. Les volailles mettent un mouvement coloré devant les étables où elles grattent, remuent et caquettent. Au-dessus de ce mélancolique paysage d’automne passent et repassent des tourbillons d’oiseaux émigrant vers des pays qui seront plus cléments que celui du Saguenay quand viendra tout à fait l’hiver ; à chaque tour de leur vol, là-haut, ils lancent, en signe d’adieu, leurs cris, comme une fusée…

Jean Thérien et sa fille arrivèrent bientôt à l’église. Elle était déjà presque remplie de fidèles qui étaient venus, eux aussi, cette veille du jour des Morts, réciter des prières pour leurs défunts.

Ô le calme impressionnant de nos pieuses églises de campagne, ces après-midis d’automne, quand le jour tombe, gris et morne, des hautes fenêtres ogivales ; on n’entend que le chuchotis des prières ardentes de ceux qui sont agenouillés là, disant leurs peines naïves et formulant leurs demandes nombreuses au Dieu enfermé au fond du petit tabernacle de bois blanc et doré du maître-autel. La lampe du sanctuaire, au bout de sa longue chaîne dorée, vacille encore des derniers tremblements que lui a imprimé le bedeau quand il est venu renouveler sa provision d’huile ; et tel est le calme qui règne dans le temple que le bruit d’une toux sèche ou que le frottement d’un chapelet