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bouleversement de sa paisible existence ? Il avait maintenant de quoi vivre pendant plusieurs jours et même plusieurs semaines. Que ne cherchait-il donc à aider un peu ce hasard ?…

Il se rendit porter le reste de son travail et n’en redemanda pas d’autre.

Puis, il se mit à sortir ; il parcourut la ville dans tous ses sens. Il visita l’Est besogneux et l’Ouest viveur et flâneur ; il connut les banlieues ; il flâna dans tous les parcs et promena son désœuvrement dans toutes les avenues. Il s’amusa de longues journées aux abords du havre ; il se sentait un grand attrait pour l’eau, pour le fleuve, et il oubliait le temps au spectacle mouvant des départs et des arrivées des navires…

On n’a jamais expliqué l’attrait irrésistible qu’exerce sur les âmes compliquées comme sur les simples, l’arrivée ou le départ des bateaux ou des trains de chemin de fer ; pas plus que l’on a bien expliqué ce besoin de crier dans les mêmes circonstances comme, d’ailleurs, dans n’importe quelle manifestation ; il semble que ce soit là un des importants privilèges de la liberté individuelle sous quelque latitude que ce soit…

De temps en temps, un puissant transatlantique débouchait à l’entrée du port ; il semble une montagne au milieu de la volée de menus bateaux pareils à des mouettes qui évoluent autour de lui et au milieu desquels il fraie sa route ; aussitôt, les grandes halles des compagnies maritimes s’animent et fourmillent de