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secondaires, transversales ou alignées presque partout le long des rives des principaux cours d’eau. Sur ces passages, à distances plus ou moins rapprochées, s’installent les vicus ou les villas isolées, les agglomérations éparses, les exploitations rurales plus nombreuses, domaines et résidences de quelque noble romain ou gaulois, dont le nom restera bientôt au paystransformé. Les débris de ces âges se rencontrent à chaque pas, abondants pourtant surtout aux approches de la Loire, sur la rive gauche, dans le Saumurois, dans les Mauges, plus rares, ce semble, dans la direction du Maine et de la Bretagne, et pour la plupart, en dehors d’Angers du moins, ne remontant plus guère au delà du IIIe ou du IVe siècle. C’est l’époque des grands bains de Frémur, de Mûrs et de Bagneux, du théâtre et des bains de Gennes, des constructions de Nombault, du temple des Châtres, des débris confus de Chênehutte, de Lézon, des tombeaux des Terres-Noires, aux portes mêmes d’Angers, dont le cimetière jusqu’alors païen se transfère alors à portée de l’église-mère dans le cœur actuel de la ville, — sans que nulle part, — Angers excepté, — aucune inscription ait pris jour dans les fouilles[1].

C’est l’époque aussi où se répandent les premières prédications. Saint FlorentFormation des paroisses évangélise le Montglonne (360 circa) et saint Macaire les Mauges (vers 400) — Saint Maurille (avant 440) abat les temples à Chalonnes et rattache le pays à son Évêché et du même coup à l’Anjou. A l’opposé saint Maxenceul et saint Doucelin (Ve-VIe siècle) abordent le Saumurois, et presque au même temps sans doute saint Maur vient fonder sur les confins mais dans l’Anjou même la première colonie soumise à la règle Bénédictine (542-583). — Les paroisses peu à peu se fondent, ralliant autour de l’humble cella ou de la basilique en bois les habitants disséminés le long des chemins, dans les clairières ou au plus profond des forêts riveraines.

On a fait une histoire qui court tous les livres, même ceux qui ne datent que d’hier, sur une prétendue confédération de républiques indépendantes, qui aurait, L’Anjou barbare. aux dernières heures de l’Empire et pendant plus d’un siècle, embrassé toutes les cités du Tractus armoricain. C’est une fiction dont il faut croire autant que du bel ordre idéal qu’on se plaît par contre à imaginer pour ces régions de la Gaule sous le régime césarien. La Bagaudie, née des misères publiques, s’y maintenait depuis près de deux cents ans, quand une poussée de barbares, pénétrant à travers les frontières effondrées, jeta des hordes de Gètes et d’Alains jusqu’aux confins de l’Ouest Celtique en proie alors à la domination de l’usurpateur Constantin (408). À ce moment l’Armorique d’abord, puis les cités annexes chassèrent du même coup les barbares envahisseurs et les magistrats, imposés par le prétendant, et durant quelques mois, se trouvèrent de fait séparées de toute communication avec Rome ; mais dès 411 le fonctionnement à peu près régulier de l’administration impériale était rétabli[2]. Néanmoins les secousses, en se multipliant, avaient détendu ou brisé tous les ressorts. Les cités l’une après l’autre répudient leur dénomination romaine et reprennent leur nom national ou celui de leur peuple. Dans le désarroi ou l’absence des pouvoirs loin-

  1. La numismatique angevine de ce second âge ne peut revendiquer encore avec quelqne vraisemblance que les statères en or au type dégénéré des Philippes Macédoniens, représentant un char attelé, que conduit un auriga ; sous le cheval, une demi-figure humaine, qui semble lui tenir les pieds, — et dans les derniers temps prend la forme d’une roue. Il en a été trouvé de beaux types près Candé et à Tigné. — Aucune pièce en bronze de ce temps n’a encore pu être attribuée à l’Anjou, au témoignage de M. Anatole de Barthélémy.
  2. Fustel de Coulanges, 2e édit., p. 591.