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L’AMOUR GREC

une communauté de vie, impliquant la communauté des biens. Écoutons ici M. Dugas dans la première édition de son livre, celle qu’il a eu la faiblesse de renier. On ne trouverait nulle part ailleurs analyse plus fine d’un sentiment que d’aucuns, de nos jours, ont peine à comprendre, parce qu’il n’a pas son équivalent dans nos mœurs. Chez les Grecs, l’amour est exclu de la vie conjugale. Le mariage n’a qu’un but religieux et politique : assurer la continuité du culte domestique et la perpétuité de la race. C’est un établissement qui ne repose pas sur une affection mutuelle[1]. Pour Xénophon, l’épouse est une ménagère[2]. L’amour, après le mariage, va aux courtisanes : avant le mariage, au compagnon d’armes, au camarade de palestre. Notez que ces liaisons entre amis sont considérées comme nobles, puisqu’elles sont interdites aux esclaves.

Cependant, la coutume n’en a pas existé de tout temps chez les Grecs. Plutarque dit : « Ce n’est que d’hier ou d’avant-hier que les jeunes

  1. Cette conception se retrouve, d’ailleurs, plus ou moins avouée, chez nous, notamment sous l’ancien régime, dans la haute société, sauf que le but des alliances est alors une coalition d’influences ou une combinaison d’intérêts.
  2. La vue bourgeoise était la même naguère en France, en Allemagne, ailleurs encore.