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LA TRADITION D’ANATHÈME

antérieur. C’est autour de la question de savoir si l’anomalie était acquise ou congénitale que la bataille s’est livrée. Tout de suite, Westphal déclara considérer la déviation comme innée. Peut-être aujourd’hui ne se rend-on plus assez compte de tout ce qu’il fallait de courage pour hasarder cette opinion. En effet, qu’on imagine un peu les conséquences qu’elle entraînait : ce n’est rien de moins que le redoutable débat de la responsabilité qui se trouvait ainsi évoqué et tranché par la négative. Une des bases de la moralité officielle était donc ébranlée. Que deviendrait l’ordre social si l’agent des mœurs allait rester pantois ? Mais l’opinion contraire trouva aussi des défenseurs. Il me paraît que c’est en France que la doctrine de l’anomalie acquise compta, jusqu’à ces dernières années, le plus de partisans. Peut-être faut-il voir là le signe d’une race qui, jusque dans le domaine pathologique, se résout difficilement à ne pas laisser quelque part d’action à la liberté humaine[1].

  1. Inutile d’ajouter que ce départ n’est vrai que dans l’ensemble. Ainsi, pour Charcot et Magnan, l’inversion est un épisode de la dégénérescence héréditaire. De même, Ch. Féré (1899) estime que l’inversion ne s’acquiert sous l’influence de conditions extérieures que dans les cas où le sujet est né avec une aptitude pour cette acquisition. Binet admet la