je me livre à vous, Bacchants ! » Ce ton est bien froid, et comme on sent que l’auteur lui-même est peu tenté ! Aussi, lorsque Flaubert entreprend de donner forme humaine à la Luxure, combien vite il oublie les éphèbes, bergers ou dieux, pour imaginer une femme « à la poitrine charnue ». Que dis-je, une femme ? Des légions de femmes ! « Inclinées, couchées, habillées, voilées, décolletées[1], nues, elles sont à toi les Filles de la Terre ! » crie la Luxure au pauvre Antoine. Et la Fornication d’ajouter ces mots, où nos jeunes gens ne trouveront qu’à rire : « Déroule ma chevelure, tu verras comme elle est longue ! » Quelle revanche de l’Éternel Féminin ! Eh ! parbleu, cette vision d’une belle fille plantureuse, c’est l’idéal sensuel de Flaubert lui-même. C’est mieux encore, un souvenir précis, celui de Louise Colet, rencontrée pour la première fois par Flaubert chez Pradier, en 1846, précisément à l’époque où le jeune Gustave conçoit le dessein d’écrire La Tentation.
À partir de 1870 environ, parallèlement à l’opinion policière qui de plus en plus faiblit,
- ↑ Ce « décolletées » est d’un Second Empire !