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LA TRADITION D’ANATHÈME

le docteur se montre alors presque uniquement sous l’aspect du médecin-légiste[1].

Aussi bien, au cours de cette période, c’est de la prostitution masculine que l’on se préoccupe seulement. C’est l’uranisme professionnel que l’on traque, celui dont les manifestations extérieures sont considérées comme une offense aux bonnes mœurs, et celui qui, par ses liaisons avec des industries criminelles : détournement de mineurs, chantages, vols, suivis parfois d’assassinats, est un élément de trouble[2]. De l’uranisme caché, non vénal, mondain, il n’est pas du tout parlé. Policiers et médecins l’ignorent comme s’il était inexistant.

Ici, je voudrais qu’il me fût permis de faire une remarque. L’opinion que la société a de certaines mœurs réagit sur elles, les colore. Il semble que, jugées abjectes, elles surenchérissent dans l’abjection. C’est là un phénomène analogue à celui par lequel la prison, en même temps qu’elle punit le coupable, ajoute à son

  1. Pour se rendre compte à quel point l’examen médical de la question eut peine à s’affranchir de l’anthropologie criminelle, il n’est que de feuilleter les Nouvelles cliniques de Casper ou l’Étude médico-légale sur les attentats aux mœurs d’Am. Tardieu (1858). Casper met en cause la décadence des mœurs. Tardieu de même. À ce mal l’un et l’autre ne voient qu’un remède : la sanction pénale.
  2. Cf. Les Mémoires de Canler, qui fut chef de la Sûreté.