Page:Porché - L’Amour qui n’ose pas dire son nom, 1927.djvu/43

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
37
DANS LE CLIMAT DE LA POÉSIE

veau en Belgique. Dans les bourgs, ils font halte à tous les cabarets. La nuit, ils dorment dans les granges ou à la belle étoile. Pourquoi ce vagabondage, ces fugues, ces campements d’un soir ? Ils ont fait un vœu insensé :

Le roman de vivre à deux hommes
Mieux que non pas d’époux modèles.

Seulement, ils avaient compté sans leur âme, cette âme chrétienne qui les enchaînait. Que de contorsions, de grimaces, pour tâcher de rompre l’entrave ! Rimbaud, dans chaque parole, vomit l’ordure et le blasphème. En vain. Quelque chose demeure, au fond de lui, qu’il ne parviendra jamais à salir. Verlaine pleure trop souvent pour qu’il n’y ait pas dans ses larmes un commencement de repentir. Alors, ils s’en sont allés par les chemins, anxieux d’oublier ces combats en changeant continuellement de gîte. Ils ont marché à grands pas, côte à côte, tels deux repris de justice, liés par le poignet à la même menotte. Rivés l’un à l’autre et se querellant déjà.

En 1895, la liaison errante de Verlaine et de Rimbaud et sa fin lamentable remontaient à plus de vingt ans. On savait que Rimbaud, après une disparition déjà légendaire, était