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RETOUR VERS LE PASSÉ

Le danger, répliquera-t-on, n’était pas si grand, puisque vous reconnaissez vous-même que votre génération n’avait, à l’égard des anomalies sexuelles, que répugnance et sévérité. En effet, nous avions des yeux pour ne pas voir. Les textes qu’on nous mettait entre les mains restaient sur nous sans influence. Nous n’y comprenions goutte, ou plutôt, car nous n’étions pas si cancres, nous les comprenions littéralement, et nous n’y voyions que du feu.

Il est vrai que certains auteurs étaient tenus à distance. Juvénal, Martial, Pétrone, ne faisaient dans nos classes que de brèves apparitions sous la forme trompeuse du morceau choisi. Dans ces occasions, force nous est de penser que nos bons maîtres nous dupaient sciemment, car ils ne nous prévenaient en aucune manière. Bien plus, il me semble aujourd’hui que, dominés par le dogme que tout est admirable dans l’antiquité, ils s’ingéniaient, en bien des cas, à nous inculquer des idées absolument fausses. Anacréon, Théocrite, par exemple, nous apparaissaient comme des « précieux », du genre Benserade. Et Catulle, nous l’imaginions un peu mièvre, alors qu’il est horriblement cru, au point que, dans une édition critique récemment parue, on renonce encore à