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GIDE AUDACIEUX

l’adolescence, ou plus exactement dans la période qui va de la puberté à l’époque des fiançailles. Il assure que la moralité est là ; ce lui semble le moyen le plus radical de supprimer la prostitution, plaie hideuse en effet[1]. Mais voilà le hic : nous n’ignorons pas que ce sont les inclinations sexuelles de l’auteur qui lui soufflent sa doctrine, et, dès lors, nous nous tenons sur nos gardes. Quand nous voyons prêcher la pédérastie dans l’intérêt des bonnes mœurs, avant d’écouter le sermon (écouter n’est pas encore suivre), peut-être souhaiterions-nous d’apprendre que le prédicateur est un homme qui, personnellement, n’a de goût que pour les femmes, mais chez lequel la soumission au devoir social est plus forte que son instinct. Jusqu’à présent missionnaire pareil ne s’est jamais rencontré.

Si le sujet était moins grave, on pourrait discerner quelque élément de gros comique dans la prétention de Corydon, cet homosexuel-né, qui, non content de partir en guerre pour la

  1. Mantegazza professait la théorie contraire. Selon lui, l’inversion ayant pour cause principale toutes les difficultés que la société apporte au commerce normal des hommes avec les femmes, il n’y aurait qu’un seul remède à l’homosexualité, ce serait de développer, d’ « intensifier », comme on dit, la prostitution. Simple pantalonnade de savant, peut-être.