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GIDE AUDACIEUX

Proust en particulier — ont habitué le public à s’effaroucher moins et à oser considérer de sang-froid ce qu’il feignait d’ignorer ou préférait ignorer d’abord. » C’est donc bien Marcel Proust qui avant tous passa les barrages ; après quoi, d’autres, Gide en tête, s’avancèrent.

Le petit pâtre brun Amyntas avait groupé autour de son image les effusions lyriques du désir clandestin ; sous l’invocation d’un autre berger de Virgile, le blond Corydon, Gide, cette fois, plaçait, en forme de dialogues, un traité didactique, sorte de « défense et illustration » du non-conformisme. Loin qu’il s’agît alors de confessions, l’œuvre se présentait comme détachée de toute préoccupation personnelle. La stricte objectivité scientifique était sa loi apparente.

Peut-être un tel parti-pris satisfaisait-il chez l’auteur, à ce moment, les derniers conseils de la prudence, en même temps qu’il s’accordait avec la répugnance sincère que Gide a toujours montrée pour tout ce qui, de près ou de loin, peut ressembler à un éclat. Là encore, la nature de l’homme est double ; il aspire à exercer une action, mais il a horreur des remous que l’action entraîne. Son attitude à l’égard du public est celle d’un pêcheur à la ligne qui, sentant que