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LA PRÉDICATION D’ANDRÉ GIDE

thèse du Bien et du Mal se retrouve chez lui vivante. À quelles oscillations elle peut donner lieu, dès qu’elle sort de l’idéologie scolaire ou de l’imagerie romantique, pour devenir un rythme de l’être, une respiration de l’âme, l’exemple de Gide le prouve. On objectera que ce n’est point là une originalité, que nous sommes tous partagés entre le bon et le mauvais. Sans doute, mais le partage est chez nous mélange confus ; nous sommes divisés avec tiédeur, avec mollesse, quand ce n’est pas souvent avec inconscience. L’originalité de Gide, dans l’espèce, vient de sa dévotion alternative aux deux principes, de la ferveur qu’il met à les servir à tour de rôle, et de sa lucidité dans les deux cultes. Tantôt il semble appartenir tout entier à l’un, tantôt se donner tout à l’autre ; et lorsqu’entre les deux une lutte s’engage, il sait qu’il est à la fois le champ clos, les duellistes et l’arbitre du combat.