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LA PRÉDICATION D’ANDRÉ GIDE

tre de la réticence, de l’allusion et du secret.

Prince du langage, ah ! sans doute, et combien ce titre qu’Oscar Wilde se décernait à lui-même, un Gide le mérite mieux, qui n’a, lui, dans sa vêture, ni strass ni clinquant. Défroque pourtant, livrée d’emprunt que cette forme si personnelle, non point en ceci que l’être qu’elle habille en a dérobé à d’autres la coupe ou la nuance, mais plus profondément dans ce sens que la vérité qu’il cherche est ailleurs que dans le bien-drapé de l’étoffe.

Gide nous conte que lorsqu’il s’embarqua, en 1893, pour ce voyage d’Algérie, qui devait le conduire à faire en lui-même de si effarantes découvertes, désireux de marquer d’un geste significatif sa rupture avec le passé, il se refusa d’emporter sa Bible. La Bible est ancienne, Gide, elle peut attendre. Qu’est-ce qu’un espace de trente et quelques années pour elle au regard de qui les siècles ne sont que de courts instants, pour elle qui donne le nom de « jours » à des âges entiers de la terre !

André Gide a réuni dans Amyntas les notes prises sur son carnet durant les séjours succes-