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LA FATALITÉ D’OSCAR WILDE

L’ancien dandy, maintenant sous la livrée grise, « tête rase et pieds de plomb », se remémore les chemins qui l’ont conduit dans cette fosse qu’éclaire une petite lucarne. Il ne s’attache point aux apparences, et, s’il reparle des roses qui jadis couvraient sa table, ce n’est que pour marquer d’une image la distance qui le sépare de sa vie passée. Tout de suite, il va au fond du procès, non pas du procès que le Tribunal a jugé, mais d’un autre, à ses yeux plus grave, le seul réel, peut-être : lui, Oscar Wilde, qui était ceci et cela, il a livré sa vie en pâture, il a, non pas même vendu, mais donné et redonné son âme à quelqu’un qui était moins que rien.

Si Bosie encore écrivait ! Mais non, pas une ligne ! Alors, les reproches éclatent, et nous apprenons ce qu’était Bosie, comme nous apprendrions ce que vaut une fille, s’il nous arrivait d’assister, derrière une tenture, à quelque scène terrible, où le vieil amant bafoué, grugé, avili, dans un sursaut de révolte, déballe pêle-mêle ses récriminations, ses mépris, ses notes d’hôtels, les factures de ses cadeaux, ses attentions délicates si mal récompensées, et le calendrier des trahisons, les orgies qui se déroulaient loin de lui quand il était malade, et les