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LA FATALITÉ D’OSCAR WILDE

des cordes goudronnées, un poète, et des plus prestigieux, élevait la voix dans l’épreuve : Ex imo clamavi. Car, bien que Wilde, à l’époque, fût mort depuis déjà cinq ans, nous écoutions sa lamentation comme si elle eût résonné à travers l’étroit judas de sa cellule. Avec lui, nous descendions les degrés abrupts de la chute sociale la plus profonde, nous mordions la fange de l’ignominie, et puis nous remontions vers une autre aurore. Une humilité magnifique, vraiment d’un prince cette fois, rayonnait dans ce livre. L’orfèvre du mot n’y faisait plus sentir sa main que pour enchâsser de temps à autre en quelque image précieuse une pensée déchirante. Le loup de carnaval gisait à terre, et le visage humain apparaissait, tout ruisselant de pleurs. Par un étrange rétablissement, le poète foudroyé qu’on avait cru anéanti annexait à l’art son propre désastre, avec son examen de conscience et son meâ culpâ. Mieux encore, il absorbait dans l’esthétique la morale et la religion, faisait du Christ l’artiste suprême, de la vie du Christ et de sa passion le modèle de la Beauté parfaite.

Mais pourquoi parlai-je au passé ? Est-ce que tout cela ne subsiste pas dans la version complète, telle qu’enfin nous la possédons ? Si,