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L’INSTINCT ÉPURÉ

L’espoir mûrit dans ses flancs. L’attitude du poète envers elle est autorité douce. Il la convie solennellement à accomplir le rite nuptial d’où dépend l’existence des générations futures. Amour, si l’on veut, mais liturgique. Ici, l’amant est prêtre, et son visage demeure grave, appliqué. Du moins est-ce là le sentiment du chantre américain dans Les feuilles d’herbe, son évangile des temps nouveaux, car, dans son existence, encore une fois, point de maîtresse visible, pas même le profil d’une passante furtivement entrevu.

L’amour qui n’est plus seulement un moyen, quelque auguste que soit celui-ci, l’amour qui est une fin en soi, qui est tout ensemble ardeur et tendresse, appel et réponse, désir et don, cet amour-là, Withman, dans sa vie, dans son œuvre, le réserve au camarade. Jusqu’où, dans la réalité, a pu se laisser entraîner cet élan, nous l’ignorons. Il est difficile de ne voir que délire verbal dans maints versets des œuvres. Aucune rhétorique, selon nous, dans Withman. Comme il arrive souvent quand le poète est grand, c’est dans sa poésie que cet homme est le plus vrai, le plus littéralement véridique.

Mais l’âme était radieuse, elle était de ces âmes dont nous parlions, qui voudraient en