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QU’EST-CE QUE L’AMOUR ?

femme, quelque ardente que soit sa passion, il nous paraîtrait ridicule de supposer que, physiquement, son désir, en l’absence de l’objet aimé, ne connaît aucune détente. Nous savons que l’être normal le plus amoureux, pendant une séparation, va de crise en crise, rythme qui comporte des intervalles, des silences entre les appels. Au cours de ces relâches, l’obsédé peut vaquer à ses affaires, passer la soirée au théâtre, lire, etc. Ou bien si, comme il est fréquent, son mal le reprend à un moment où il n’a pas le loisir de s’y abandonner, au milieu de l’agitation du monde, son âme immédiatement fait la part du feu, avec plus ou moins de succès suivant la force de son caractère, et il continue de sourire ou de discuter, de débattre, parfois avec assurance, des questions très embrouillées, sans que ses interlocuteurs, ou même ses adversaires, puissent soupçonner l’incendie qui se développe en d’autres points de sa pensée. Bref, nous admettons que, chez l’hétérosexuel, épris et hanté, la vie psychique ne s’arrête pas complètement, butée contre le désir, ou qu’elle ne se déverse pas toute dans la concupiscence. Mais, dès qu’un homosexuel est en cause, alors même qu’il n’aime personne et qu’il ne désire pas, nous prêtons à toutes ses attitudes, à toutes